Par Christiane Diagne
Dans la première loi n° 2006-03 du 04 janvier 2006 instituant la Caisse des Dépôts et Consignations signée par Abdoulaye Wade et Macky Sall, la mission de la CDC est, inter alia, de financer le « logement social », c’est à dire les HLM pour les familles modestes. Toujours sous l’empire de cette loi notamment en son article 8, le Directeur général de la CDC est nommé par le Président de la République pour une durée de 6 ans renouvelable une seule fois, et il est révoqué par lui selon sa convenance ou sur demande motivée de la Commission de surveillance (il n’y a pas de Conseil d’administration à la CDC).
En prélude à la nomination d’Aliou Sall à la tête de la CDC, une nouvelle loi est votée spécialement pour satisfaire sa boulimie pouvoiriste démesurée. Avec la Loi n° 2017-32 du 15 juillet 2017 sur la CDC signée par Macky Sall et Boun Abdallah Dionne, le puiné du Roi Aliou Sall, bombardé Directeur Général, est non seulement assis sur un trésor de guerre de 200 milliards, mais bénéficie en outre d’un « rebranding » total de statut de la CDC. Une loi donc taillée sur mesure, et qui l’érige de facto en second personnage de l’État après son frère de Président.
Avec la nouvelle loi de 2017, la priorité de la CDC n’est plus le logement social, bas de gamme et populaire, mais le financement du « logement de standing » (selon les termes même de l’exposé de motifs). C’est avec cet élargissement et orientation de ses missions vers le luxe et le chic, que Aliou Sall a pu lancer la construction de sa Tour d’ivoire infernal à 33 milliards aux Mamelles plutôt que de financer des HLM aux enseignants à Diourbel, Matam ou Fatick.
Mais chose plus « mackyavélique », désormais le Directeur est nommé pour une durée illimitée si l’on s’en tient à la rédaction de l’article 30 qui se contente juste d’une formule lapidaire: « La Caisse des Dépôts et Consignations est dirigée et administrée par un Directeur général nommé par décret ». Toutes les mentions sur la durée de son mandat et le renouvellement ont disparu.
Mais plus grave, cette nouvelle loi élague la possibilité pour la Commission de surveillance de demander au Président de la république, la révocation du DG. Aliou Sall est protégé d’une mutinerie de cette Commission, qui ne peut plus, comme l’exige le scandale actuel de la BBC, se désolidariser et demander sa révocation pour sauvegarder la confiance des investisseurs et déposants.
La cerise sur le gâteau est généreusement allouée par l’art 34 qui soustrait la passation des marchés publics de la CDC des rigueurs du Code des marchés publics. Désormais, c’est à la CDC de fixer ses propres règles à partir de son propre manuel de procédures interne. Autrement dit, il n’y a plus besoin d’appels d’offre mais que des gré à gré pour le grand bonheur des sociétés écrans familiales et des copains.
La fratrie avant la patrie, nouvelle devise du Sénégal avec notre complaisante complicité. Cheers !!!
