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L’Autoroute Ila Touba : un levier stratégique pour l’aménagement économique du territoire sénégalais

L’Autoroute Ila Touba : un levier stratégique pour l’aménagement économique du territoire sénégalais

 
La réalisation de l’Autoroute Ila Touba participe de la stratégie mise en œuvre par l’Etat sénégalais pour fluidifier la circulation entre Dakar et Touba, les deux métropoles les plus importantes du pays du point de vue démographique. Mais, il s’agit plus que de cela. En effet, elle contribuera à impulser un dynamisme de type nouveau au corridor Dakar-Touba et à en faire un poumon émergent du développement national.
Au niveau mondial, les corridors ont toujours existé et ils ont pris des formes diverses selon les époques et les évènements qui sous-tendent leur genèse et leur développement. En Afrique subsaharienne, les premiers corridors sont apparus avec le commerce caravanier et ont permis de faciliter les rapports commerciaux avec l’Afrique du Nord. Des villes telles que Tombouctou au Mali, Agadez au Niger ou Kano au Nigeria doivent leur genèse à ce commerce qui constitue l’un des principaux moments fondateurs de l’urbanisation sur les axes précoloniaux  comme Tripoli-Tombouctou, Ghadamès-Kano ou Benghazi-Abéché.
Dans leurs formes actuelles, les corridors doivent leur développement à la généralisation de l’automobile comme moyen de transport et à la densification des réseaux routiers et ferroviaires modernes. Limités à de petits espaces au début, les corridors franchissent aujourd’hui les frontières nationales et mettent en réseaux des agents économiques de plus en plus distants.
Dans son rapport de l’année 2010 sur l’état des villes africaines, ONU-Habitat a consacré une section importante à ces configurations spatiales nouvelles qui déterminent de plus en plus le devenir des Etats concernés. Le corridor Dakar-Touba fait partie des cas mis en exergue dans ce rapport.
Dans les études d’intelligence économique récentes, les corridors font l’objet d’une attention particulière du fait de leurs capacités à transformer les espaces qu’ils traversent et à générer des dynamiques favorables au développement économique. Dans un rapport de 2011 réalisé par le Cabinet Ernest & Young, intitulé « It’s time for Africa », l’axe Dakar-Touba a été identifié comme faisant partie des corridors économiques les plus prometteurs du continent.
La FAO a également fait allusion au corridor Dakar-Touba dans une étude publiée en 2014 intitulée  « Making economic corridors work for the agricultural sector ». Les exemples ne finissent donc pas !
 
Les corridors naissent en général de deux manières :
1. Ils peuvent être le résultat de processus spontanés : c’est le cas du corridor Dakar-Touba dont la forme et la dynamique actuelles n’ont obéi, jusqu’ici, à aucun plan connu visant à faire de l’axe Dakar-Touba un corridor économique ou urbain. Pour l’autoroute Ila Touba, sa particularité réside véritablement dans sa capacité à s’inscrire dans des dynamiques, certes spontanées, mais certifiées solides et structurantes par les spécialistes pour l’aménagement et le développement économique du territoire. Cette démarche est maintenant systématiquement confortée par le Plan Sénégal émergent (PSE) qui fixe les grandes orientations en matière de politique publique et de développement du territoire national à l’horizon 2035. En cours de validation, le Plan national d’aménagement et de développement du territoire national (PNADT) dont l’élaboration est confiée à l’Agence nationale de l’aménagement du territoire (ANAT) s’inscrit dans la même logique. Il y est proposé la création de deux métropoles d’équilibre représentées par Thiès et Touba et une métropole régionale centrée sur Diourbel. Avec ce schéma, le corridor Dakar-Touba verra sa fonction de pivot renforcée et constituera – à l’image de la « Banane bleue » qui structure les territoires européens de Milan à Londres, ou de l’Arc méditerranée qui fédère les régions Sud de l’Europe occidentale de l’Espagne à la péninsule sicilienne-, l’un des principaux couloirs d’impulsion des grandes dynamiques économiques du territoire national et plus largement de la sous-région. En aménagement du territoire, les dorsales sont importantes pour impulser vigoureusement les dynamiques souhaitées et garantir les grands équilibres spatiaux grâce au jeu croisé des mouvements centripètes et centrifuges qu’elles engendrent de part et d’autre de leur tracé. Elles produisent et renouvellent « l’énergie cinétique » nécessaire à la dynamique de l’ensemble et assurent des fonctions de relais entre les parties les plus éloignées d’un territoire ;
2. Les corridors peuvent être provoqués : c’est-à-dire voulus et planifiés. Dans ce cas, leur réalisation procède d’une réelle volonté d’aménagement et de développement territorial exprimée à travers des projets gigantesques, comme c’est souvent le cas dans les pays développés et dans certaines économies émergentes (Emirats arabes et autres pays d’Asie ou d’Afrique du Nord). Au Sénégal, le projet d’autoroute Mbour-Kaolack qui prolonge les sections Dakar-AIBD-Mbour obéit à cette démarche.
Eléments caractéristiques des corridors : le cas particulier de Dakar-Touba
 
Les corridors sont des formes spatiales complexes certes, mais identifiables à partir de quatre éléments caractéristiques :
✓ un axe de circulation dynamique et structurant de par sa longueur et par le volume important de flux qu’il draine,
✓ deux pôles terminaux suffisamment puissants pour attirer des flux sur plusieurs dizaines, voire des centaines de kilomètres. La puissance d’un pôle terminal se mesure en général à son poids démographique qui détermine son rayon d’action et à sa fonction économique qui constitue un facteur déterminant dans la décision des agents économique à s’y rendre ou non,
✓ des centres-relais actifs et de niveaux divers ayant pour fonction la polarisation et la structuration des espaces intermédiaires,
✓ un mécanisme de bassin versant qui permet à l’axe principal d’entraîner, à l’aide de ses axes perpendiculaires, des flux sur plusieurs kilomètres de part et d’autre de son tracé.
Passé au crible de ces quatre critères, le corridor Dakar-Touba apparait comme un cas singulier au Sénégal, et en Afrique de l’Ouest :
– Long d’environ deux-cents kilomètres (200 Kms), il est l’un des axes les plus fréquentés du pays, s’il n’est pas le plus fréquenté. Son trafic ne cesse de fasciner les analystes et autres observateurs du fait de son ampleur, mais également de la diversité des usagers et des agents économiques impliqués. Il forme aujourd’hui un couloir d’une faible largeur, en parallèle à l’autoroute Ila Touba avec laquelle il interagit intelligemment tout le long du corridor ;
– Ses pôles terminaux, Dakar et Touba, sont les deux premières agglomérations urbaines du pays, avec respectivement 3 millions et plus de 800.000 habitants au dernier recensement général de la population (ANSD, 2013). Les départements dans lesquels ils sont localisés enregistrent les soldes migratoires positifs les plus importants du pays selon cette même source ; 
– Son tracé est jalonné de villes de tailles variées alternant avec de petits centres ruraux très dynamiques (Km50, Thiénaba, Ndangalma, Bambey Sérère, Lagnar, Patar, Ndoulo …), avec une distance moyenne maximale de 30 kilomètre entre deux villes, et de 15 kilomètres seulement entre deux centres importants, toutes catégories confondues ;
– Grace à ses axes perpendiculaires, l’axe Dakar-Touba draine des flux importants de part et d’autre de son tracé sur plusieurs dizaines de kilomètres. Une grande ville comme Kaolack par exemple est nécessairement connectée à l’axe Dakar-Touba via Diourbel, du fait de ses rapports privilégiés avec Touba. Elle entraine dans son sillage celle de Fatick qui entretient en même temps des relations de plus en plus importantes avec celle de Bambey grâce à la réhabilitation récente de l’axe routier qui les relie ;
– Aujourd’hui, le corridor Dakar-Touba est le seu…


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