Dans une allocution marquée par une profonde dignité, elle a dénoncé ce qu’elle appelle les « effaceurs du Joola » ceux qui, par leur silence ou leur indifférence, contribuent à l’effacement progressif de la mémoire collective. « La douleur la plus profonde, ce n’est pas seulement celle des pertes humaines. C’est celle d’un drame dont on détourne les yeux. D’un pays qui a trop longtemps fermé les siens. »
Pour Sira, la mémoire du Joola est non seulement un devoir, mais une condition indispensable pour la reconstruction des familles, et au-delà, de toute une nation.
  Orpheline depuis l’âge de 11 ans, elle parle aujourd’hui pour les milliers de familles qui, comme la sienne, portent encore les stigmates d’un drame évitable. « Ce naufrage n’est pas le fruit du destin. C’est celui d’un système défaillant, d’une négligence institutionnelle. » 
  Elle a rappelé que les 1 863 victimes officielles (et probablement bien plus), issues de 16 pays différents, n’ont jamais obtenu la reconnaissance qu’elles méritent. 
Face aux autorités présentes dont le ministre des Forces Armées, Sira Gassama a lancé un plaidoyer structuré, répété comme un appel à la conscience : « Il est temps de rendre justice aux victimes. Il est temps de dire la vérité, non pas comme un geste symbolique, mais comme un impératif. Il est temps de soigner les familles, non pas pour répondre à une exigence administrative, mais pour éviter leur effondrement. Il est temps de renflouer l’épave et de retirer les ossements, non pas comme une manœuvre politique, mais comme un acte de respect envers les morts et les vivants.
  À plusieurs reprises, elle a pris à témoin les nouvelles autorités de l’État : « Monsieur le Président Bassirou Diomaye Faye, Monsieur le Premier ministre Ousmane Sonko, vous incarnez un espoir. Ce que nous attendons de vous, c’est une mémoire réparatrice. » 
  Car pour elle, la grandeur d’un pays ne réside pas seulement dans sa croissance économique ou sa puissance militaire, mais dans sa capacité à reconnaître ses drames, à y faire face et à s’en relever avec humanité. 
Dans la dernière partie de son intervention, Sira a exhorté à une véritable politique de mémoire, à la réhabilitation des victimes, à la création d’un musée vivant, à un changement profond des mentalités. « Le Joola est une cicatrice. Pas à cause des passagers, mais parce qu’un système l’a rendu possible. Et ce système pèse encore sur notre conscience collective. »
Lorsque sa voix s’est tue, le silence a envahi la foule. Un silence lourd, chargé d’émotion. Celui qu’impose la vérité lorsqu’elle est dite avec force, sans détour, par une survivante qui n’a rien oublié.
Le Joola n’est pas un drame lointain. C’est une dette de mémoire. Une urgence de vérité. Un appel à ne jamais laisser sombrer l’histoire.
     
 
   
   
                 
                 
                