Cependant, le tout premier tableau présenté par le Premier ministre lors de l’annonce du Plan de redressement économique et social trahit tout l’inverse : une confusion profonde, un amateurisme manifeste et une légèreté inquiétante face à la responsabilité d’État.
Ce tableau, censé illustrer un plan de redressement, aligne des fautes inadmissibles dans un document officiel.
« Le transformation » au lieu de « la transformation », « Sénégl » au lieu de « Sénégal ». Une faute d’orthographe grossière, projetée en pleine diffusion nationale.
Cela traduit un défaut manifeste de relecture professionnelle, de validation institutionnelle et de respect du public. Lorsqu’une présentation censée mobiliser une nation est aussi négligée dans sa forme, il devient difficile de croire en sa crédibilité sur le fond.
Ce visuel maladroit est, en réalité, fidèle à l’ensemble de la présentation du Premier ministre. Il évoque des « réformes » dans la phase de redressement, en citant le dialogue national, les assises de la justice ou encore les États généraux sectoriels, alors qu’aucune loi n’a, à ce jour, été adoptée à l’issue de ces rencontres.
Il mentionne le cabinet Mazars sans en présenter les conclusions, alors qu’il s’agit de l’audit le plus attendu par les bailleurs, notamment le FMI. À la place, il amalgame les chiffres de Mazars, de la Cour des comptes et de l’IGE, pour affirmer sans nuance : « Ces différents audits débouchent sur un constat très difficile pour le Sénégal avec un déficit cumulé à 14 % et une dette publique qui est à 119 % du PIB. »
Or, ces audits ne couvrent ni les mêmes périmètres ni les mêmes périodes et les chiffres de Mazars ne sont même pas encore publics.
Il confond prévision budgétaire et exécution effective en déclarant : « Aujourd’hui, on est à moins 8 % de déficit dans la LFR. Donc la moitié du chemin a déjà été parcourue.»
Ce chiffre est un objectif inscrit dans la Loi de finances rectificative 2025 et non un résultat atteint. C’est une approximation grave surtout dans un discours de politique économique.
Il évoque l’éventualité d’un transferts monétaires directs aux ménages vulnérables tout en ouvrant une porte béante au détournement et à la corruption compte tenu des difficultés d’une vérification physique.
Il annonce la gratuité éventuelle des médicaments génériques, évoquée au conditionnel, comme si la politique publique se décidait par hypothèse.
Il généralise une fiscalité tous azimuts, sans en expliciter les mécanismes. Influenceurs, fumeurs, parieurs, cinéphiles, propriétaires…,tout y passe. Cela tient davantage du réflexe de percepteur que d’une stratégie économique.
Parallèlement, silence absolu sur les fonds politiques qu’il avait qualifiés d’illicites, sur les budgets faramineux des institutions, sur leurs propres dépenses de prestige.
Ce premier tableau, fautif dans la forme, vide sur le fond n’est pas un incident isolé. Il est le miroir d’une méthode de gouvernement floue non maîtrisée où les effets d’annonce remplacent l’action rigoureuse, et où la communication tient lieu de stratégie.
Thierno Bocoum
Président AGIR- LES LEADERS