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Dette cachée : les vraies raisons du blocage entre Diomaye Faye et le FMI

Dette cachée : les vraies raisons du blocage entre Diomaye Faye et le FMI

Une importante délégation sénégalaise a fait le déplacement à Washington en marge des assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale. Les négociations pour un nouveau programme ont commencé mais elles s’annoncent compliquées. Coulisses.

Certains sourires sont francs, d’autres un peu plus crispés. Après le rendez-vous crucial pour l’avenir du Sénégal qui a eu lieu en marge des Assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale, organisées du 13 au 18 octobre à Washington, Kristalina Georgieva, la directrice du FMI, Abebe Selassie, le directeur Afrique de l’institution financière, Cheikh Diba, le ministre sénégalais des Finances et du Budget, Abdourahmane Sarr, le ministre de l’Économie et Mabouba Diagne, le ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Élevage ont pris le temps de poser pour une photo de groupe.

Est-ce le signe que les discussions ne se passent pas aussi bien que prévues ? Interrogé sur le contenu des négociations en cours, le ministère sénégalais des Finances et du Budget se refuse à tout commentaire « pour des raisons de confidentialité ». La directrice générale du FMI a quant à elle évoqué, sur X, une « réunion productive ».

Lors d’une conférence de presse, Abebe Selassié a assuré que les négociations pour un nouveau programme ont commencé cette semaine. « Le point le plus important est de comprendre ce que veut le gouvernement, quelles sont leurs priorités, leurs capacités de financement, et, c’est à partir de là, que nous pourrons déterminer leurs besoins et les réformes que nous pourrons mettre en place », a détaillé le directeur Afrique.

Vers une restructuration ?
Dans ce cadre, des négociations doivent se poursuivre à Dakar la semaine du 20 octobre à l’occasion d’une nouvelle mission du FMI dans le pays. Selon nos informations, que l’institution conteste et sur lesquelles les autorités sénégalaises n’ont pas souhaité réagir, la perspective de devoir restructurer tout ou partie de la dette crée des tensions.

« La restructuration, c’est une procédure qui prend souvent des années, comme le montre l’exemple du Ghana ou de la Zambie. C’est aussi une procédure douloureuse qui nécessitera des sacrifices et un plan d’austérité, explique un bailleur de fonds au fait du contenu du dossier. Les autorités sénégalaises sont pressées d’obtenir un nouveau programme et, parfois, elles ne semblent pas comprendre la gravité de la situation. »

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Selon les dernières données disponibles issues de l’inventaire réalisé par Mazars entre mars et juillet dernier, la dette du Sénégal a atteint 118,8 % du PIB à fin 2024, soit bien plus que le ratio de 74,41 % officiellement annoncé par l’administration de Macky Sall à fin 2023. Selon nos calculs, la « dette cachée », un terme que conteste fermement l’ancien président sénégalais, s’établit à plus de 10,5 milliards d’euros, chiffre sur lequel le FMI et les autorités s’accordent désormais.

Austérité
Alors que l’agence de notation Moody’s a une nouvelle fois dégradé la note du Sénégal en lui attribuant une note de Caa1 assortie d’une perspective négative au motif qu’elle craint « l’augmentation des risques concernant la trajectoire d’endettement et des liquidités disponibles », les négociations entre le FMI et l’État du Sénégal portent désormais sur la stratégie à adopter pour retrouver une trajectoire d’endettement soutenable.

« Il y aura des efforts à faire sur plusieurs aspects, explique Edward Gemayel, le chef de mission du FMI au Sénégal. Il y a, d’une part, un certain nombre d’exemptions fiscales qui peuvent être supprimées progressivement. » Les autorités ont, par exemple, mentionné une exemption de taxe accordée à un hôtel pour l’achat d’oreillers. Mises bout à bout, ces exemptions représentent l’équivalent de plus de 7 % du PIB. « D’autre part, le gouvernement envisage d’augmenter les taxes sur les jeux de hasard et de supprimer progressivement les subventions à l’énergie, tout en augmentant les transferts aux ménages les plus modestes pour limiter les impacts sociaux d’une telle mesure », révèle-t-il.

Dans le même temps, l’État Sénégalais sera contraint de suspendre l’essentiel des dépenses d’investissements. De quoi retarder la stratégie nationale de développement, la Vision 2050, du président Bassirou Diomaye Faye qui ne pourra pas effectivement être lancée avant plusieurs années.

Jeune Afrique 


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