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Pour une éthique politique : l’urgence des choix justes

Pour une éthique politique : l’urgence des choix justes

Dans un monde où la politique influence la vie des citoyens, l’éthique en politique est cruciale. Elle cherche à définir des règles éthiques pour guider l’action publique, en veillant à ce que les décisions des gouvernants soient dans l’intérêt général et conformes aux valeurs éthiques établies. Cette sagesse pratique, indispensable pour bâtir des sociétés stables et justes, s’inspire de traditions philosophiques et culturelles variées, fournissant une boussole solide pour une gouvernance moderne.

Les piliers d’une gouvernance éthique.

L’éthique politique s’inscrit dans une tradition intellectuelle séculaire, à travers les âges et les continents. Des sagesses africaines aux philosophes classiques, la justice, la dignité humaine et la responsabilité collective ont toujours inspiré l’action publique.

En Afrique, la charte du Mandé proclamée à Kouroukan Fouga au XIIIᵉ siècle sous l’empire du Mali est un exemple frappant. Transmise oralement par les griots, elle proclame des principes novateurs comme l’abolition de l’esclavage, l’inviolabilité de la personne humaine, la recherche de la justice sociale et la participation des femmes à la vie publique. Ce texte était un code éthique et initiatique, connu des dignitaires et des guerriers, et sa redécouverte au XXᵉ siècle a nécessité une transmission orale ardue.

La philosophie Ubuntu « je suis parce que nous sommes » souligne l’interdépendance humaine, la solidarité et la responsabilité collective. Nelson Mandela s’en est inspiré pour le processus de réconciliation sud-africain, prouvant son utilisation concrète pour bâtir une société juste et apaisée.

Aristote, dans sa Politique, soutenait que la finalité de la cité est de permettre aux citoyens de mener une vie vertueuse et épanouie, en plaçant la justice au cœur de l’organisation sociale.

Emmanuel Kant, lui, a élaboré une approche déontologique et universaliste, mettant l’accent sur le respect absolu de la dignité humaine comme impératif catégorique de toute action politique.

Plus récemment, John Rawls, avec sa Théorie de la justice, a proposé le « voile d’ignorance ». Pour assurer l’équité, les règles sociales doivent être établies sans que les législateurs sachent quelle sera leur propre place dans la société, garantissant ainsi une impartialité maximale.

Responsabilité et transparence : les fondements de l’action politique

Un principe essentiel de l’éthique politique est la responsabilité des gouvernants. Ils doivent être responsables de leurs actions par le biais de mécanismes de transparence et de contrôle démocratique. La charte du Mandé prévoyait déjà une responsabilisation, les rois devant consulter les assemblées de sages. De même, dans d’autres cultures ouest-africaines (Akan, Yoruba), les chefs étaient responsables devant leur peuple, sous peine de déposition.

Des leaders comme Amílcar Cabral ont incarné cette nécessité, appelant à une moralité stricte et au refus de la corruption pour accompagner la libération nationale. Cette vision résonne avec des voix actuelles comme celle d’Achille Mbembé qui prône une « éthique de la vie » contre les logiques de prédation, ou dans le rêve de Kwame Nkrumah d’une Afrique unie par la justice sociale.

Conclusion : une boussole éthique pour les enjeux actuels

L’éthique politique n’est pas seulement une question théorique, c’est une nécessité pratique pour toute société qui souhaite être viable et juste. En croisant les héritages (les sagesses pratiques de la charte du Mandé et de la philosophie Ubuntu, la quête du bien commun d’Aristote, l’universalisme de Kant, la justice équitable de Rawls), nous nous armons d’une boussole plus solide et plus inclusive.

Face aux enjeux mondiaux (crises climatiques, inégalités, défiance démocratique), le besoin d’une telle boussole est criant. C’est choisir le long terme contre l’instant, l’intérêt général contre les privilèges, la justice contre la facilité. Cela nécessite des institutions robustes, une citoyenneté engagée et une demande constante de transparence. En nous inspirant de ce patrimoine éthique universel, nous pouvons construire les instruments d’une action politique à la fois efficace, juste et responsable. Il s’agit de bâtir des sociétés où la confiance revient, où chaque choix est fait en pensant à celles et ceux qui le vivront. C’est un chemin ardu, mais c’est le seul vers la paix et la prospérité.

CHERIF SALIF SY 
DAKAR – SÉNÉGAL
27 septembre 2025


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