Poursuivies pour vol commis la nuit avec usage de fausse clé et complicité, Khoudia S. et son Nafi ont été jugées, hier par le tribunal correctionnel de Dakar pour avoir subtilisé plus de cinq millions de francs CFA à une amie proche.
Khady D. ne s’attendait pas à ce que le prix de la confiance soit aussi élevé. Après des années de complicité, de rires partagés et de confidences, elle considérait Khoudia S., non seulement comme une amie, mais comme une véritable sœur de cœur. Khady croyait pouvoir lui tout dire. C’est ce qu’elle a fait part à Khoudia de son grand projet : elle confie avoir réussi, au prix de nombreuses privations, à épargner 5 millions de francs CFA pour préparer un voyage à l’étranger. Seulement, profitant de l’effet de surprise et de la proximité affective, Khoudia a monté un coup avec une amie, Nafi S., pour lui dérober l’argent. Après neuf mois de détention provisoire, Khoudia et sa complice ont comparu hier mercredi, devant le Tribunal correctionnel de Dakar pour vol commis la nuit avec effraction et usage de fausses clefs.
Les faits remontent au jeudi 18 avril 2024. Ce jour-là, Khoudia rend visite à son amie Khady. Au cours de la discussion, cette dernière lui parle de son projet de voyage à Dubaï ou en Chine, dans le but d’acheter de la marchandise. Elle lui explique avoir vendu ses bijoux, et être parvenue à réunir la somme de 5,4 millions de francs CFA. Khady l’invite même dans sa chambre pour lui montrer l’argent, soigneusement conservé dans un sac enfermé dans son armoire. À la fin de la visite, Khoudia prend soin d’oublier son passeport.
Le lendemain, aux alentours de 23 heures, elle appelle et l’invite à la rejoindre dans un appartement appartenant à une amie. Khady, selon ses confidences, n’est pas très enthousiaste, mais Khoudia insiste, en lui demandant au passage de lui rapporter son passeport. À son arrivée, elle découvre que Nafi est également sur les lieux. Quelques minutes plus tard, Khoudia lui sert une boisson. « Dès que je l’ai bue, mes paupières sont devenues lourdes. Je ne pouvais plus tenir », racontera-t-elle à la barre. Toujours selon Khady, elle passe tout le week-end dans cet appartement, sombrant sans cesse dans le sommeil. Ce n’est que le dimanche soir qu’elle parvient enfin à regagner son domicile. Là, elle découvre avec stupéfaction que sa porte est ouverte. Rien n’indique un cambriolage. Mais en vérifiant son armoire, elle constate que le sac contenant l’argent a disparu. Son premier réflexe est de contacter Khoudia. Cette dernière nie toute implication. Peu convaincue, Khady dépose une plainte contre X auprès de la cybercriminalité.
Dès le début de l’enquête, les deux prévenues, convoquées, ont nié toute participation, affirmant qu’elles dormaient dans l’appartement en question et que des inconnus en sont passés lors de leur sommeil. Après cette première audition, elles sont relâchées. Entre-temps, les résultats de l’enquête révèlent que des appels téléphoniques émis vers et depuis les téléphones des prévenues coïncidaient avec les heures de l’effraction. L’exploitation des vidéos de surveillance de la zone montrent Khoudia et Nafi en train d’aller à l’appartement de Khady. Mieux encore, les enquêteurs découvrent que Khoudia a utilisé une partie de la somme pour acheter un terrain. Les deux amies décident de quitter le pays. Elles sont interpellées à la frontière du Mali, puis placées sous mandat de dépôt.
Jugées hier, après neuf mois de détention préventive, les deux prévenues ont maintenu leurs dénégations. À la barre, Khoudia a tenté de se défendre. Selon ses propos, le jour où la plaignante lui a montré l’argent, elles n’étaient pas seules dans l’appartement. L’amant de la partie civile était également présent. Mieux encore, elle affirme que tous deux étaient dans un état d’ébriété avancé. Cependant, confrontée aux résultats de l’expertise technique, elle finit par concéder qu’elle s’était bel et bien rendue de nuit dans l’appartement de Khady, mais uniquement, insiste-t-elle, pour récupérer son passeport. Nafi, poursuivie pour complicité, nie toute implication. Sous le regard insistant de la partie civile, elle soutient qu’elle ne la connaît que très peu. Mais, convaincu de leur culpabilité, le procureur a requis contre elle une peine de 6 mois ferme, assortie d’une amende de 500.000 francs CFA. La défense a plaidé la relaxe et la fin de la poursuite. Elles seront fixées sur leur sort le 24 septembre prochain.
L’OBS
