Habituellement discret, Oumar Sow, PDG de la Compagnie Sahélienne d’Entreprises (CSE), a accepté de sortir de sa réserve le temps d’un entretien fleuve dans le podcast Afrofeeling, diffusé sur YouTube. Pendant plus d’une heure, le fils d’Aliou Sow est revenu sur ses impressions personnelles, ses rapports avec les dirigeants sénégalais et les épisodes marquants de l’histoire de la CSE.
Interrogé sur sa rencontre avec le président Bassirou Diomaye Faye, Oumar Sow a livré un témoignage empreint de respect : « J’ai rencontré Diomaye le 26 décembre 2024, une seule fois. J’ai découvert un homme très posé, très réfléchi, très calme. Je pense que c’est un homme qui m’a l’air juste », a-t-il déclaré.
Et de poursuivre : « Je pense que si vous avez un problème, il sera juste dans sa décision. Il ne favorisera personne sur des critères subjectifs. Il est droit dans ses bottes. »
Fondée en 1970, la Compagnie Sahélienne d’Entreprises s’est imposée comme un acteur incontournable des travaux publics au Sénégal. Forte de sa position dans le paysage infrastructurel national, la CSE a naturellement été en contact avec les différents chefs d’État du pays — des relations qui, selon Oumar Sow, n’ont pas toujours été simples.
Une audience électrique avec Me Wade
Le dirigeant de la CSE est ainsi revenu sur une rencontre houleuse avec l’ancien président Abdoulaye Wade et son Premier ministre de l’époque, Idrissa Seck. Une audience qui a marqué durablement les rapports entre l’État et l’entreprise familiale.
« On ne le connaissait pas », raconte Oumar Sow. « Mon père l’avait seulement croisé une fois, quand il était ministre d’État sous Abdou Diouf. Et cette première audience s’est très mal passée. »
Aliou Sow, fidèle à son habitude, entame son allocution par un récit de son parcours : « Je suis parti de rien depuis 1970… » Mais il est aussitôt interrompu par Me Wade, qui lance : « Mais Sow, tu es égocentrique. On est tous partis de rien. Tu n’es pas le seul. Idrissa, tu n’es pas parti de rien ? »
Oumar Sow se souvient avoir perçu une tension sur le visage de son père. Celui-ci reprend néanmoins la parole et évoque l’importance de la CSE pour le pays : « La CSE, c’est un patrimoine national… » Ce à quoi Abdoulaye Wade rétorque : « Moi aussi, Abdoulaye Wade, je suis un patrimoine national. »
Le climat se détériore davantage lorsque Aliou Sow évoque des projets réalisés par sa société, notamment la route Dialakoto-Kédougou. Nouvelle pique du chef de l’État : « On m’a dit que tu as donné beaucoup d’argent à Tanor (Ousmane Tanor Dieng) sur ce projet-là. »
Un échange qui frôle le burlesque, selon Oumar Sow : « Là, j’éclate de rire, parce que ça devient comique », confie-t-il. Il ajoute que la relation entre son père et l’ancien président ne s’est jamais vraiment apaisée par la suite.
Aujourd’hui à la tête de la CSE, Oumar Sow poursuit l’héritage laissé par son père tout en cultivant un rapport plus apaisé avec les nouvelles autorités. Dans ce rare moment de confidence, il a aussi esquissé les contours de sa propre vision du leadership : entre équité, lucidité et mémoire des luttes.