Le dossier semblait simple : une interpellation, de la drogue, un flagrant délit. Mais l’affaire Mandiaye Sall, livreur de 30 ans arrêté avec 60 comprimés d’ecstasy à Pikine-Marché Zinc, a rapidement pris une tournure plus explosive devant le tribunal des flagrants délits de Pikine-Guédiawaye. En cause : des accusations graves de corruption visant les policiers enquêteurs, lancées par le mis en cause et l’un de ses proches.
Une livraison de nuit qui vire à l’arrestation
Selon Les Échos, tout est parti d’un renseignement transmis à la Division des investigations criminelles (DIC) sur un présumé réseau de trafic de drogue opérant dans les quartiers de Pikine. La descente s’est faite dans la nuit, vers minuit, au moment où Mandiaye Sall, célibataire et sans enfant, s’apprêtait à effectuer une livraison. Dans son sac : 60 comprimés d’ecstasy.
Arrêté sur le champ, le livreur a été inculpé pour offre ou cession de drogue, une infraction lourdement punie par le code pénal. À la barre, il a fermement nié toute intention de trafic, affirmant n’être qu’un simple coursier, pris au piège d’un client régulier surnommé « Leuz ».
Une version contestée par l’accusation
« C’est la troisième fois que je faisais une course pour Leuz », a-t-il déclaré. « Les deux premières, je devais livrer des papiers, puis de la nourriture. Je ne savais pas que cette fois-ci, il s’agissait de drogue ».
Mais pour le procureur, cette histoire relève de la fiction. « Ce Leuz est né de votre imagination », a-t-il asséné, estimant que Mandiaye Sall savait pertinemment ce qu’il transportait. Il a requis 2 ans de prison ferme contre le livreur.
Accusations de corruption : le dossier bascule
Dans une tentative désespérée de défense, Mandiaye Sall a accusé les policiers de lui avoir demandé un pot-de-vin de 1 million de francs CFA pour le relâcher. Faute de paiement, il aurait été arrêté.
Des propos jugés très graves, mais appuyés par Cheikhouna Thiam, un ami qui l’accompagnait cette nuit-là et qui a été brièvement interpellé. Ce dernier affirme avoir payé 200 000 F CFA aux policiers pour être libéré. « J’ai appelé deux amis qui m’ont chacun envoyé 100 000 francs. Dès que j’ai payé, ils m’ont laissé partir », a-t-il déclaré à la barre.
Le procureur, sceptique, a souligné qu’aucune mention de Cheikhouna Thiam n’apparaissait dans la procédure et que, s’il avait réellement été présent au moment de l’arrestation avec 60 comprimés, il aurait été inculpé lui aussi. Des affirmations jugées inconsistantes et opportunistes, selon le parquet.
L’avocat de la défense, Me Malick Mbengue, a tenté de jouer sur la corde sensible. Il a plaidé la relaxe de son client, arguant d’une “détention inconsciente” et soulignant l’absence d’intentionnalité. Mais dans un climat tendu par des accusations de corruption et un contexte de lutte contre la drogue, la décision du tribunal est très attendue.
Le verdict est attendu le 21 mai prochain.