Par SERIGNE SALIOU GUÈYE
En 2008, quand Macky Sall portait sur les fonts baptismaux l’Alliance pour la République/Yaakaar (APR), deux députés libéraux, Moustapha Cissé Lô et Mbaye Ndiaye, se faisaient remarquer au sein de leur groupe parlementaire par leur proximité avec le patron du nouveau parti APR. Une telle attitude suspicieuse fut considérée comme démissionnaireau sein du PDS. Après plusieurs manœuvres et tripatouillages des textes du PDS, de ceux de l’Assemblée nationale et de la Constitution, le parti libéral résolut d’exclure ces députés « rebelles » qui s’accointaient avec le nouvel adversaire d’Abdoulaye Wade. Ils avaient certainement commis une forfaiture et le délit de soutien à Macky Sall, nouvel ennemi juré de la famille Wade.
  C’est ainsi que le 15 janvier 2009, le Parti démocratique sénégalais venait de faire perdre aux 
  députés Moustapha Cissé Lô et Mbaye Ndiaye leur mandat de député. Et cela, suite à 
  l’application des dispositions de  7 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale 
  stipulant que tout député démissionnaire de son parti en cours de législature est 
  automatiquement déchu de son mandat. Et cela en conformité avec  60 de la 
  Constitution qui stipule que « tout député qui démissionne de son parti en cours de législature 
  est automatiquement déchu de son mandat ». Une telle loi était introduite dans les textes de 
  l’Assemblée nationale et de la Constitution pour mettre un terme aux députés qui 
  transhumaient en fonction de leurs intérêts personnels. 
  L’opposant Abdoulaye Wade en avait souffert du temps d’Abdou Diouf. Des 18 sièges de 
  députés obtenus par le PDS à l’issue des élections législatives de 1978, Abdoulaye Wade en 
  avait perdu 8 durant la législature 1978-1983 à cause la transhumance. Ces démissions des 
  députés libéraux transhumants en faveur du PS au pouvoir avait coûté à la formation 
  libérale son groupe parlementaire. C’est pourquoi, une fois Président, il avait tenu à légiférer 
  dans ce sens. Ces exclusions des deux députés avaient soulevé l’ire et l’indignation des 
  Sénégalais profondément attachés aux principes démocratiques qui font carburer une 
  République. 
  Le président du groupe parlementaire Libéral et Démocratie, Doudou Wade, soutenait qu’« 
  au cours de plusieurs cérémonies publiques, dans des déclarations relayées par la presse et 
  confirmées par les intéressés, messieurs Lô et Ndiaye avaient soutenu qu’ils n’adhéraient plus aux idées du PDS et avaient rejoint le camp de ses adversaires ». Ainsi la direction du PDS, qui avait invoqué l’alinéa 1 de  5 de ses statuts et règlement intérieur pour confirmer leur 
  attitude démissionnaire, s’était adossé sur  7 du règlement intérieur de l’Assemblée et 
  de  60 de la Loi fondamentale pour exclure les députés libéraux Moustapha Cissé Lô et Mbaye Ndiaye 
  Les deux députés concernés avaient beau ruer dans les brancards pour contester leur 
  exclusion illégale mais rien n’y fit. La raison d’Etat avait fini par prendre le dessus sur le droit. 
  C’est ainsi que Macky Sall, une fois élu président de la République, avait pris la décision 
  d’indemniser ses camarades de parti qui avaient été déchus de leur poste de député pour 
  l’avoir soutenu et adhéré à son projet politique. Les indemniser voudrait signifier que l’acte 
  d’exclusion était illégal et par conséquent, il fallait réparer pécuniairement ce préjudice. 
  C’est pourquoi parlant de l’exclusion de Aminata Touré, on ne peut invoquer la jurisprudence 
  de Moustapha Cissé Lo et Mbaye Ndiaye. Sinon au lendemain du départ du Président Macky 
  en 2024, le nouveau régime qui s’installera doit procéder à une indemnisation réparatrice 
  pour Mimi. Pourquoi n’a-t-on pas invoqué la jurisprudence Déthié Fall ? En mars 2021, 
  député, il avait, en effet, créé son parti et démissionnait de facto de Rewmi. Mais il avait 
  continué à conserver son poste de député jusqu’à la fin de la législature sans que cela ne 
  posât problème. On peut citer dans la même veine Issa Sall du PUR qui avait pris ses 
  distances du Parti de Moustapha Sy mais tout restant député. 
  Aujourd’hui ceux qui avaient subi cette injustice en 2009 sont les promoteurs de cette 
  injustice en 2023. C’est pourquoi l’argument de l’attitude démissionnaire de Mimi évoqué ne 
  repose sur aucun fondement légal. L’illégalité de 2009 ne peut pas être légalisée en 2023 par 
  la seule volonté du Prince qui veut s’offrir la tête de sa tête de liste aux dernières législatives. 
  C’est un déni de justice ! Cette sanction à l’encontre de Mimi Touré montre à suffisance que 
  l’indemnisation de Moustapha Cissé Lo et Mbaye Ndiaye estimée à plus de 100 millions de 
  francs n’était en réalité qu’un détournement de deniers publics puisque ne reposant sur 
  aucune base légale. Aucune loi, aucune règle ne leur permettaient de bénéficier de cette 
  obole. Seule la volonté du Président avec ses libéralités suffisait pour réparer ce que Abdou 
  Mbow appelait une injustice. Cette injustice est devenue aujourd’hui une justice avec 
  l’exclusion de Mimi Touré de l’Assemblée nationale. Ainsi l’ancienne présidente du CESE n’a 
  qu’à engager la bataille juridique car comme le disait Thomas Jefferson « quand l’injustice 
  devient loi, la rébellion devient devoir ». 
  Avec le pouvoir de Macky Sall, toutes les injustices et toutes les illégalités se muées en justice 
  et légalité. Le même phénomène est constatable avec l’histoire de la 3e candidature brandie 
  par le Président sortant et ses souteneurs. En 2012, il faisait partie des généraux de l’armée 
  des démocrates qui refusaient mordicus de laisser Abdoulaye Wade se présenter une 
  troisième fois à la présidentielle. En 2012, si la Constitution le lui permettait, l’éthique non !
     
 
  