L’administration de la justice requiert le respect de certaines règles et principes fondamentaux considérés comme des normes universelles pour garantir l’exercice d’une justice libre, crédible et impartiale. Le respect de l’ensemble de ces règles, tout au long de la chaîne pénale, confère au procès son caractère équitable. Ce concept est très souvent employé pour mettre en exergue l’irrespect de certaines règles procédurales constitutives de garanties que tout Etat soucieux de son image sur la scène internationale devrait observer.
Parmi ces normes universelles, on peut évoquer le droit de contester la décision rendue par la voie de l’appel. Cette règle, à savoir le droit d’appel encore appelé dans certaines conventions le droit à la révision du procès, est universellement consacrée. L’article 14-5 du pacte international sur les droits civils et politiques auquel le Sénégal a adhéré dispose que « toute personne déclarée coupable d’une infraction pénale par un tribunal a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité et la condamnation, conformément à la loi ».
En droit comparé, le caractère absolu de cette règle ne se démontre plus. D’ailleurs, la Cour européenne des droits de l’homme a fixé sa jurisprudence sur cette question depuis longtemps sur le fondement de l’article 7 de la convention la régissant et l’a même imprimée dans toutes les législations des pays membres. Sur ce fondement, tout texte qui l’ignore pourrait être considéré comme contraire à la constitution sénégalaise, laquelle a affirmé dans son préambule son adhésion aux instruments internationaux adoptés par l’Organisation des Nations Unies et l’Organisation de l’Unité Africaine, devenue l’Union Africaine.
Le droit d’appel est fondé sur l’idée selon laquelle les juges peuvent se tromper, il faut alors permettre à la personne condamnée d’être jugée par une autre juridiction autrement composée et, en principe, hiérarchiquement supérieure à la première.
Ce recours devant une juridiction supérieure qui signifie l’examen par une autre juridiction de fond du second degré, n’est pas prévu par la loi n°81-54 du 10 juillet 1981 portant création de la cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI). Une lacune que le comité des droits de l’homme des nations unies qualifie d’atteinte grave aux principes qui gouvernent un bon procès pénal.
Pour la bonne compréhension de cette lacune nodale qui met en évidence les méandres de la loi précitée, il convient de rappeler les faits (I) en passant par la décision du comité des droits de l’homme sur ladite lacune (II) avant de formuler des recommandations (III) à l’endroit de l’Etat du Sénégal.
I. Rappel des faits.
En mars 2012, quelques mois après les élections présidentielles remportées par monsieur Macky SALL, l’Etat du Sénégal, dans le cadre de la lutte contre la corruption, les détournements de deniers publics, l’enrichissement illicite et la promotion de la bonne gouvernance, avait lancé une opération dénommée « la traque des biens mal acquis »
A cet effet, l’Etat du Sénégal en réactivant la cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI) a engagé des poursuites contre un certain nombre de personnes ayant occupé des postes de responsabilité dans le gouvernement sortant. Parmi celle-ci, on peut citer monsieur Karim WADE qui exerçait de 2009 à 2012 les fonctions de ministre d’Etat, ministre de la coopération internationale, des transports aériens, des infrastructures et de l’énergie du Sénégal.
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