Étant un trait d’union entre l’Amérique latine et l’Europe du fait de son emplacement stratégique, le Sénégal devient de plus en plus un pays de blanchiment d’argent et de transit pour les trafiquants à cause de ses infrastructures et de ses frontières poreuses. Cette question de criminalité transfrontalière demeure un sujet préoccupant et surtout très complexe. Cela se justifie par le développement du trafic de drogue, de véhicules de luxe, d’êtres humains et d’armes lourdes. Quand l’ancienne route des Caraïbes a été fermée, les narcotrafiquants ont fait de notre espace un point de transit. Cela représente un danger réel face aux investissements étrangers et à la circulation des biens et des capitaux. En somme, c’est une menace pour la stabilité économique de notre pays. Il est évident que le trafic de drogue interfère directement avec l’activité économique légale. D’importants montants d’argent sont infusés dans le système financier dans le but de payer les pots-de-vin aux facilitateurs, qui doivent à leur tour, rendre ces sommes légitimes. Ces systèmes de blanchiment d’argent sont très complexes et impliquent le placement de cet argent « sale » dans le système financier, puis transférer au niveau international pour masquer la piste d’audit et de rendre la détection quasi-impossible. Doit-on accepter que le Sénégal soit devenu un paradis de blanchiment d’argent et de point de transit des narcotrafiquants ou peut-on trouver un remède face à ce fléau ?
Cellule de renseignement inactive
La cellule de renseignement financier du Sénégal est devenue opérationnelle en août 2005. Depuis cette date, elle a reçu des centaines de déclarations suspectes et la majorité des déclarations sont faites par les banques et quelque provenant de la douane. Les déclarations ont souvent à voir avec le trafic de drogue, le trafic de diamants, la fraude fiscale et la corruption. Il faut noter que 99 % des cas déclarés n’ont abouti à presque rien. Des accords bilatéraux d’entraide judiciaire en matière pénale avaient été signés avec les pays de la sous-région et avec la France dans le but d’extradition et d’assistance judiciaire. Cela permet à la CRF de partager des informations avec d’autres cellules de l’espace UEMOA, mais souvent ces cellules sont dormantes dans la plupart des pays.
Le Sénégal est très vulnérable au blanchiment d’argent et il y a des preuves irréfutables d’activités criminelles accrues de la part d’étrangers, tel que le trafic de drogue par des groupes latino-américains et le trafic d’immigrants clandestins. La plupart des affaires de blanchiment d’argent concernent la corruption et le détournement de fonds générés dans notre pays. Le marché immobilier est en grande partie financé par des liquidités et la propriété des biens immobiliers n’est pas transparente. L’Etat a trop laissé faire et les fonds détournés des marchés et caisses noires ont favorisé le boom de la construction et les prix élevés de l’immobilier. La minorité a manipulé le marché pour que les populations croient que l’immobilier est cher au Sénégal, or, il ne devait point l’être dans un pays qui n’a presque rien à offrir à part sa stabilité déguisée. Une autre partie de cet argent sale transite via notre aéroport international, notre port et nos frontières poreuses. Leur destination principale est la capitale sénégalaise et la petite côte. Pourtant, le 6 février 2004, le Sénégal était le premier pays de l’UEMOA à promulguer la loi uniforme sur le blanchiment de capitaux. Cette législation est conforme aux normes internationales, cependant elle n’était pas conforme concernant les hommes politiques exposés et n’était pas non plus conformes pour les institutions non-financières.
La corruption et le détournement de fonds constituent la source de blanchiment d’argent, même s’il ne faut pas écarter les rapports gouvernementaux. Il y a plusieurs dossiers dans le bureau du procureur sans qu’ils ne deviennent publics. Qu’est-ce qu’on nous cache ? Il y a les transferts importants en espèces via l’aéroport et des envois importants de fonds provenant des Sénégalais de l’extérieur vers les régions de Diourbel et de Louga. Ces fonds, qui s’élèvent à des dizaines milliards de dollars par année, passent sous les radars et sont blanchis dans le marché immobilier, les propriétés de luxe, les casinos et autres. Pourquoi le gouvernement ignore-t-il ce fléau qui déstabilise l’économie d’un pays ?
Dakar : nouvelle capitale de transit