Depuis quelques heures, les partisans du régime et les avocats de l’Etat s’épanchent dans les médias, affirmant avec une incroyable audace, que la confirmation de la condamnation de Khalifa SALL par la chambre criminelle de la Cour suprême ce 03 janvier 2019 revêt un caractère définitif. Il convient de préciser que ces affirmations sont totalement fausses, et ne reposent sur aucun argument juridique.
- La Cour suprême confirme que le rabat d’arrêt est suspensif en matière pénale
Un éclairage juridique d’une importance capitale sur le rabat d’arrêt, consigné dans un document de 14 pages intitulé « Doctrine » et publié au bulletin d’informations N°5 et 6 de la Cour suprême en décembre 2014 clôt définitivement le débat sur la question. A la page 112, du document d’une haute portée juridique, intitulé « le rabat d’arrêt devant le juge de cassation », M. Abdourahmane DIOUF, Ancien Avocat Général à la Cour suprême, ancien Directeur du Service de Documentation et d’études de la Cour suprême, et actuel Président de la chambre criminelle de la Cour suprême souligne de manière claire, nette et précise les matières qui permettent de déterminer si un rabat d’arrêt est suspensif ou non. A la page 112, le Président de la chambre criminelle de la Cour suprême définit les 4 matières pour lesquelles, le rabat d’arrêt est suspensif :
- En matière d’état des personnes (divorce, successions par exemple),
- En matière de vente immobilière,
- En matière de faux incident,
- En matière pénale, sauf pour les condamnations civiles ou s’il y a des dispositions législatives contraires.
Le cas de Khalifa Sall relevant de la matière N°4 (matière pénale), un rabat d’arrêt introduit par ses conseils revêt obligatoirement un caractère suspensif. Il n’y a aucune ambiguïté possible à ce niveau. L’intérêt du document est qu’il met fin à toute possibilité d’interprétation juridique (dévoyée) du rabat d’arrêt, puisque dès l’entame, est mis en exergue « la Position et le rôle de la Juridiction de cassation nationale dans la pyramide judiciaire ». La doctrine reflète donc la position officielle de la Cour suprême sur la requête en rabat d’arrêt. Cette position de la Cour suprême sur le rabat est une réplique de 36 de la loi organique 2017-09 du 17 janvier 2017, dont les dispositions sont les suivantes :
Article 36 de la loi organique : Le délai de recours et les recours ne sont suspensifs que dans les cas suivants :
- En matière d’état des personnes (divorce, successions par exemple),
- En matière de vente immobilière,
- En matière de faux incident,
- En matière pénale, sauf pour les condamnations civiles ou s’il y a des dispositions législatives contraires.
Pour savoir si un rabat d’arrêt est suspensif ou pas, il faut se référer aux dispositions de 36 de la loi organique 2017-09 du 17 janvier 2017. La matière N°4 (matière pénale) de 36 définie à 36 s’applique à Khalifa Sall. C’est la Cour suprême, elle-même, qui le précise sans aucune ambiguïté. La position de la Cour suprême est confortée par 52 de la loi organique de la loi organique 2017-09 du 17 janvier 2017 « La requête en rabat d’arrêt est présentée par le procureur général ou déposée par les parties elles-mêmes au greffe de la Cour suprême, à peine d’irrecevabilité, dans le délai d’un mois suivant la notification prévue à 49 du dernier alinéa. Les dispositions des articles 32 à 42 de la présente loi organique sont applicables aux procédures en rabat d’arrêt déposées par les parties ».
Il faut lire attentivement 52 qui précise que « les dispositions des articles 32 à 42 de la loi organique s’appliquent aux procédures en rabat d’arrêt ». Entre 32 et 42, il y a 36 qui précise que le rabat d’arrêt est suspensif en matière pénale (matière N°4). Il y a une parfaite correspondance entre la position de la Cour suprême (le rabat est suspensif en matière pénale aux termes de 36 « matière N°4 ») et le contenu de 52, dont un alinéa précise que « 36 s’applique aux procédures en rabat d’arrêt ».
- Pourquoi le rabat d’arrêt est-il suspensif en matière pénale ?
A la page 104 du document de la Cour suprême, le rabat d’arrêt est défini comme « la mise à néant par la juridiction de la décision qu’elle a rendu, lorsque celle-ci est entachée d’une erreur manifeste, résultant, dans la procédure, d’une défaillance de service et donc, non imputable aux parties, et ayant affecté la décision rendue par le Juge de cassation ». Tout le monde se souvient que dans l’affaire Karim WADE, le Procureur Général près le Cour suprême, Badio CAMARA avait, introduit une requête en rabat d’arrêt, pour « annuler » la décision de la Chambre criminelle de la Cour suprême en date du 06 février 2014, qui déclarait recevable, le recours de Karim Wade contre l’ordonnance de la commissio…